Là, au fond à l’angle du mur écaillé, une faune minutieusement apprêtée y est réunie. Lunettes de soleil oversized, pulls en grosse maille déstructurés, cheveux faussement négligés, ils rient et chipent dans les plats à partager. On les aperçoit sourire. Un coude posé, l’autre main s’agite, tantôt la fourchette tantôt le verre de vin, on observe de loin ce théâtre joyeux. Les assiettes colorées à la manière d’une peinture impressionniste défilent sur le comptoir blanc, tandis que les chefs dansent une valse animée avec les casseroles et le feu. Du coin du bar, à moitié assis sur le haut tabouret, on découvre la carte variable au gré des saisons et des humeurs puis l’on crie la commande. En ce moment, on se délecte autour d’un ceviche de seriole fleuri, de moules marinières et salicorne, d’un homard bleu au beurre blanc, de leur fameuse sélection de charcuterie parmi laquelle une cecina de boeuf de Galice et de légumes en farandole. Accompagnement oblige, leurs vins “de soif” sont un argument suffisant pour visiter les lieux et l’on goûte la France par le biais de vignobles renommés comme inconnus au bataillon. Devant nous, couverts en pagaille, bouteilles de vin, ardoise dessinée et miches de pain empilées témoignent de la vie exaltée des lieux: on passe, on repasse, on montre du doigt, on s’assoit et on repart, plus heureux qu’on est arrivé.